Les armes de l’influence

Présentation du livre :

Quels sont les facteurs qui poussent un individu à accepter une proposition ? Et quelles sont les techniques les plus efficaces pour amener ce consentement ?

Comment comprendre que certaines personnes soient douées d’un véritable don pour la persuasion ? Déconstruire les mécanismes de manipulation à l’oeuvre vous permettra assurément de vous prémunir contre toutes les manoeuvres malintentionnées, visant à vous faire adhérer à un argumentaire ou acheter un produit que vous n’auriez pas voulu acquérir en temps normal.

Intérêts du livre :

– l’écriture est très accessible : illustrée par de nombreux exemples issus de la vie quotidienne ou d’une actualité qui nous est familière, on entre dans la démonstration proposée par l’auteur comme dans un roman;

– le propos est clair, argumenté et présenté de manière particulièrement convainquante.

Limites du livre :

L’auteur s’est essentiellement intéressé aux conditions sociales de conditionnement du comportement, et aux mécanismes cognitifs qui nous conduisent à sélectionner les informations, à les prendre en compte ou à les rejeter pour prendre une décision.

Pourtant, d’autres approches existent (notamment en psychologie clinique et psychanalyse) qui permettent de mettre en évidence d’autres leviers d’influence qui ne font pas non plus intervenir la coercition pour être efficaces. Ils demandent néanmoins une prise de conscience peut-être plus profonde des mécanismes qui régissent notre rapport au désir (réflexion à suivre dans un prochain article…).

 

Chronique et résumé :

Quels sont les facteurs qui poussent un individu à accepter une proposition ? Et quelles sont les techniques les plus efficaces pour amener ce consentement ?

Robert Cialdini, chercheur en psychologie sociale, nous livre les résultats de plus de dix années de recherches sur la question. En rapportant les expériences menées dans le cadre de nombreuses recherches, ainsi que l’analyse de divers exemples historiques et d’actualité, les mécanismes d’influence et de manipulation auxquels nous sommes continuellement confrontés sont progressivement mis à jour.

Il existe des milliers de tactiques différentes pour « faire dire oui ». Elles peuvent cependant être classées selon 6 principes psychologiques qui permettent d’expliquer le processus de consentement à l’œuvre : la réciprocité, l’engagement et la cohérence, la preuve sociale, l’autorité, la sympathie  et la rareté.

Le livre est émaillé d’exemples, notamment issus de recherches menées en psychologie sociale expérimentale. Dans la présentation qui suit, je me suis attachée à mettre en évidence comment les différents principes présentées dans ce livre étaient allègrement utilisés par les blogueurs soucieux de monétiser leurs services (mais attention, par forcément à mauvais escient).

Chapitre 1 : les armes de l’influence

Des études menées sur les animaux montrent que ceux-ci ont des comportements qui s’apparentent à des réflexes automatiques à certains stimuli : une dinde prend par exemple soin de ses petits dès lors qu’ils émettent le son « tchip, tchip ». Comme la réaction de l’animal est automatique (instinctive), il est possible de placer des leurres sur sa route, et l’amener par exemple à materner une simple peluche qui émettrait le même son.

Nous considérons souvent avec tendresse et tout de même un peu de condescendance ces comportements qui mettent si bien en évidence la supériorité de l’intelligence humaine. Et pourtant, nous procédons nous aussi de la sorte même si nous n’en avons pas toujours conscience : un certain nombre de nos comportements sont conditionnés. Pourquoi ?

Nous avons appris à répondre de manière automatique à certains stimuli parce que cela nous évite d’avoir à penser. Et même si cela nous conduit à adopter régulièrement des comportements inadaptés, nous acceptons cette imperfection : nous n’avons pas le choix. Sans cela, nous passerions notre temps à supputer, évaluer et analyser au lieu d’agir.

Mais nous ne sommes pas obligés de l’accepter sans réagir. C’est d’ailleurs l’objectif de ce livre que de mettre en évidence nos comportements automatiques ainsi que les stimuli qui les déclenchent. Nous pourrons ainsi prendre la mesure de leur influence et détourner les pratiques de manipulation dont nous faisons régulièrement les frais.

Voici deux exemples de procédés qui influencent notre jugement :

  • La justification : nous avons tendance à accéder plus facilement à une demande justifiée (même si la personne inclue simplement dans sa phrase les mots « parce que » sans même donner d’informations supplémentaires). Une expérience montre par exemple qu’une demande de couper la file pour faire des photocopies est acceptée à 94% lorsque la personne justifie sa demande, et seulement à 60% lorsque les mots « parce que » n’apparaissaient pas dans la phrase.
  • Le principe de contraste : notre perception d’une information est influencée par les données qui ont été portées à notre connaissance juste avant. L’auteur donne l’exemple d’une expérience où l’on demande aux participants de plonger simultanément une main dans une bassine d’eau chaude et l’autre dans une bassine d’eau froide, puis les deux mains dans une bassine d’eau tiède : l’eau tiède paraîtra plus ou moins chaude/froide en fonction de la température du bain précédent.

Chapitre 2 : la réciprocité

L’une de nos règles sociales particulièrement ancrée est qu’il faut s’efforcer de payer de retour les avantages reçus d’autrui.

N’avez-vous jamais rencontré dans la rue de personnes venant spontanément vous offrir quelque chose, pour ensuite vous demander autre chose en retour (signer une pétition, entrer dans un magasin, faire une donation…) ?

Le principe de demander l’adresse email des internautes en échange d’un podcast, d’un e-book ou d’un article quelconque fonctionne sur ce principe : c’est donnant-donnant.

Les dettes forcées

Mais la dette peut être « forcée » : on vous donne une chose que vous ne souhaitez pas ou que vous n’avez jamais demandée pour obtenir quelque chose de vous. Marcel Mauss, un grand anthropologue français, décrivant les pressions sociales s’exerçant sur les procédures de don dans les sociétés humaines, a pu parler de « l’obligation de donner, l’obligation de recevoir et l’obligation de rendre ».

Les échanges inéquitables

Ces principes peuvent ainsi nous conduire à accepter des échanges inéquitables, pour ne pas avoir à subir le désagrément de se sentir redevable. C’est par exemple la raison qui conduit nombre de femmes à refuser qu’on leur offre un verre : elles savent bien qu’elles vont être jugées plus « accessibles sur le plan sexuel » si elles acceptent.

Les concessions réciproques

La règle de réciprocité suscite les concessions mutuelles de deux façons :

  • Un bénéficiaire d’une concession pousse à rendre la pareille ;
  • L’obligation de rendre encourage la création de pactes sociaux avantageux : nous savons que notre sacrifice sera suivi d’un échange.

Ce principe des concessions réciproques peut néanmoins jouer contre nous. Prenons l’exemple de la tactique « grosse requête-petite requête » : si nous repoussons une demande que nous jugeons trop contraignante, nous avons tendance à accepter juste après une demande moindre, même si nous ne l’aurions pas acceptée de prime abord.

Cialdini donne l’exemple d’un petit voisin, venu lui vendre des billets de tombola à 5 dollars pour une fête scolaire. Sachant qu’il ne s’y rendrait pas, Cialdini décline l’offre. C’est alors qu’une nouvelle demande lui est faite : acheter quelques barres de chocolat à 1 dollar pour participer au financement de l’évènement. Il accepte cette seconde requête. Arrivé chez lui, il se demande néanmoins ce qui l’a conduit à acheter ces barres qu’il ne mangerait assurément pas. C’est alors qu’il mesure qu’il n’aurait certainement pas accédé à cette deuxième requête si elle lui avait été faite d’emblée, mais que, dans la mesure ou le petit vendeur venait d’accepter son premier refus, il s’était senti obligé d’accéder à sa deuxième demande…

La tactique des requêtes décroissantes met en évidence deux autres éléments :

  • Les sujets opposés à un adversaire se sentent davantage responsables de l’accord final (et sont donc plus prompts à accepter un compromis une fois qu’ils ont opposé un refus).
  • Même si ce qu’ils obtiennent au bout du compte est peu avantageux, les sujets soumis à cette tactique se révèlent les plus satisfaits de l’accord final.

Comment dire non ?

Un sollicitateur qui recourt à la règle de réciprocité est un ennemi redoutable. En se présentant armé d’une faveur ou d’une concession initiale, il s’assure le concours d’un puissant allié dans sa campagne de persuasion.

Mais souvenez-vous que le véritable adversaire dans l’histoire, c’est cette règle sociale qui vous obligerait à rendre lorsque l’on vous donne. Pourtant, si la règle dit qu’il faut répondre à un présent par un autre présent, elle ne dit pas qu’il faille répondre par un présent à un geste calculé.

Une manœuvre tactique de promotion commerciale ne vous oblige à rien.

Chapitre 3 : engagement et cohérence

Le principe d’engagement et de cohérence nous conduit à réagir de façon à justifier nos décisions antérieures.

L’inconséquence est généralement considérée comme un défaut. Nous accordons ainsi tant d’importance à la cohérence que nous en oublions parfois la pertinence de notre jugement. C’est d’ailleurs du fait de ce principe que le slogan « il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis » fut si populaire à une certaine époque (la publicité mettait en avant, pour ceux qui ne s’en souviennent, un dessert au chocolat…).

Car la cohérence obstinée nous offre un luxe bien agréable : nous n’avons plus à réfléchir à la question, il nous suffit de penser, dire ou faire ce qui concorde avec notre décision antérieure.

La cohérence automatique joue le rôle de bouclier contre la réflexion. Cialdini en donne un exemple tout à fait éclairant. Deux années consécutives, il s’étonne en effet de rencontrer l’un de ses voisins dans un grand magasin, seulement quelques semaines après les vacances de noël…pour acheter un jouet coûteux à son fils.

Cette coïncidence l’amène à s’interroger sur les raisons qui, contre toute logique, l’amène à acheter de nouveaux cadeaux au mois de janvier. Il rencontre alors un collègue ayant travaillé quelque temps dans un magasin de jouets qui lui explique la technique employée par les enseignes pour booster leurs ventes aux mois de janvier et février, juste après les fêtes :

  • Une campagne de publicité sur un jouet ciblé est matraquée à la télévision juste avant les fêtes : de nombreux parents s’engagent ainsi auprès de leurs enfants à leur offrir le jouet convoité pour noël…
  • Le jouet est cependant approvisionné en sous-quantité auprès des distributeurs, créant ainsi artificiellement une pénurie qui contraint les parents à se rabattre sur d’autres jouets.
  • Après les fêtes, une nouvelle campagne de publicité attire de nouveau l’attention des enfants sur le jouet en question, ceux-ci ne manquant pas de rappeler aux parents leur promesse d’avant les fêtes.
  • Tenus par leur engagement, de nombreux parents retournent donc au magasin pour acquérir le jouet, qui se trouve alors comme par magie en quantité suffisante dans les rayons.

C’est l’engagement pris par le parent (et la volonté de rester cohérent et de tenir ses promesses) qui le pousse à se laisser prendre au piège de cette manipulation commerciale.

L’engagement

Si je peux vous pousser à un engagement quelconque (c’est-à-dire à prendre position, publiquement), j’aurai préparé le terrain et pourrai vous pousser à vous en tenir, avec une cohérence automatique et inconsidérée, à cet engagement.

Les exemples donnés pour illustrer cette technique sont particulièrement éloquents. Cialdini expose notamment comment les Chinois pendant la guerre de Corée ont conduit de nombreux prisonniers américains à collaborer avec eux, allant jusqu’à tenir des propos sympathisants à l’égard du communisme et même à dénoncer les projets d’évasion de leurs camarades de camp.

La démarche était progressive : les gardes obtenaient tout d’abord quelques critiques oralement formulées contre les Etats-Unis (« après tout, tout n’est pas parfait…n’est-ce pas ? »), puis ils demandaient aux prisonniers de noter ces critiques par écrit, afin de les lire ensuite publiquement devant l’ensemble du camp. De petites concessions étaient ainsi manipulées pour devenir par la suite de véritables engagements publics.

A partir de petits engagements, il est en effet possible de manipuler l’idée qu’un individu se fait de lui-même. Mais il faut que certaines conditions soient réunies pour que le procédé soit efficace :

  • Les actes sont primordiaux : c’est par ses actes qu’un individu connaît sa propre personnalité et juge celle des autres. Les Chinois demandaient ainsi toujours aux prisonniers d’écrire : l’auteur était ainsi insidieusement amené à penser qu’il croyait réellement ce qu’il écrivait. Les gens ont une tendance naturelle à croire qu’une déclaration reflète l’opinion véritable de la personne qui la fait, même lorsque ce n’est pas le cas.

Le fait de savoir qu’on les considérait comme des personnes charitables a poussé par exemple des ménagèrent interviewées au Connecticut à aligner leurs actions sur l’idée qu’autrui se faisait d’elle.

  • Il faut que la personne conserve la responsabilité de son action. Ainsi, des concours d’écriture étaient régulièrement organisés dans les camps de prisonniers chinois, mais les récompenses étaient anecdotiques (quelques cigarettes…). Les prisonniers écrivaient donc d’eux-mêmes des textes sympathisants à l’égard du communisme, sans contrainte.
  • L’œil public : les engagements rendus publics sont des engagements durables et nettement moins influençables que ceux qui sont pris secrètement.

Une personne raconte ainsi avoir fait une liste de toutes les personnes dont elle souhaitait conserver l’estime. Puis elle leur a envoyé son engagement écrit d’arrêter de fumer. Chaque fois qu’elle était tentée, elle repensait aux personnes auprès desquelles elle s’était engagée, ce qui lui permit d’arrêter définitivement de fumer.

  • L’effort supplémentaire : plus un engagement a demandé un effort important, plus il engagera la personne qui l’a fait.

Certains défis socialement organisés donnent par exemple lieu à des épreuves testant la résistance des participants à l’épuisement physique, à la tension nerveuse et au ridicule (comme les bizutages ou les compétitions sportives) et suscitent ainsi un sentiment d’appartenance au groupe d’une grande intensité.

  • Le choix intérieur : les personnes qui se sentent personnellement responsables de leur décision s’y tiennent beaucoup plus que celles qui ont été contraintes par la force ou la menace. Ainsi, moins la pression extérieure est importante, plus la motivation est efficace.

Pour obtenir ce type d’engagement, l’une des tactiques consiste à promettre un avantage qui sera ensuite retiré. Entre-temps, le futur acheteur aura eu tout le temps de se donner d’autres raisons de vouloir le produit.

Par exemple, on vous propose un service via internet gratuitement « pendant 30 jours ». Vous souscrivez au départ parce que c’est gratuit, l’acheteur partant du principe que les 30 jours d’essai vous permettront de vous donner tous les arguments pour vous engager ensuite dans un abonnement payant.

L’auteur rapporte également un exemple de manipulation éloquent : alors qu’il roule sur l’autoroute, un automobiliste est immédiatement attiré par un panneau qui annonce un prix d’essence au litre plusieurs centimes inférieurs au prix habituellement pratiqué. Il engage alors sa voiture dans la station essence…pour s’apercevoir au moment de se servir que le prix affiché est supérieur à ce qui était annoncé. Prêt à se servir mais toujours immobile, il est interpelé par le responsable qui lui demande pourquoi il ne prend pas d’essence. Interrogé sur les prix, le responsable explique que l’augmentation est récente et qu’il n’a pas eu le temps de changer l’affichage. Que faire…

Evidemment, c’était le prix attractif qui avait conduit l’automobiliste à s’arrêter. Pourtant, même si ce premier argument n’est plus valable, d’autres se sont ensuite ajoutés : finalement, le prix est identique à ce qui se pratique ailleurs, maintenant qu’il est prêt à prendre de l’essence, autant le faire…

Mais c’était sans compter sur la nouvelle intervention du responsable de la station essence : « est-ce que vous pensez que je suis en train de vous arnaquer ?! » Et bien, la réponse était dans la question, ce qui permit à l’automobiliste de trancher son dilemme et de tourner les talons.

Comment dire non ?

Une cohérence mal avisée nous conduit à prendre des décisions que nous n’aurions pas prises autrement. Lorsque nous repérons ce procédé dans une technique de vente, la mettre à jour permet souvent de déstabiliser l’interlocuteur, qui opère donc un retrait.

Chapitre  4 : la preuve sociale

« Lorsque tout le monde pense pareil, personne ne pense vraiment » Walter LIPPMANN

Suivant le principe de la « preuve sociale », l’un des moyens de déterminer ce qui est bien est de découvrir ce que d’autres personnes pensent être bien. Les actions des personnes qui nous entourent seront alors un élément important de la réponse.

En effet, habituellement, lorsqu’un grand nombre de personnes fait quelque chose, c’est que c’est la meilleure chose à faire. Mais cette vérification par les faits est à la fois la force et la faiblesse du principe de la preuve sociale, car les « professionnels de la persuasion » utilisent bien souvent ce raccourci pour nous piéger.

Par exemple, certains propriétaires de discothèques fabriquent des preuves apparentes de la qualité de leur club en créant artificiellement de longues files d’attente devant la porte, alors qu’il reste beaucoup de place à l’intérieur.

Le consultant en vente et marketing Cavett Robert formule très bien ce principe dans ses conseils aux apprentis vendeurs : « comme 95% des gens sont par nature des imitateurs et seulement 5% des innovateurs, les gens sont plus facilement persuadés par les actions de leurs semblables que par tout autre argument que nous pouvons leur donner ».

Le phénomène « d’ignorance collective »

Lorsque nous ne sommes pas sûrs de nous, nous sommes davantage disposés à nous en remettre aux actions d’autrui pour déterminer la conduite à tenir.

Ce phénomène est particulièrement repérable dans les situations où des passants se retrouvent confrontés à des victimes ayant un besoin urgent d’assistance : lorsque de nombreux témoins sont présents, la responsabilité de chacun se trouve diluée dans le groupe.

En définitive, nous « saurons » d’après la façon dont les autres réagissent, si le cas est urgent ou non. Bien souvent, c’est ainsi que chacun conclut de l’impassibilité générale que tout va bien. Pour la victime, la sécurité vient du nombre.

Une étude réalisée à Toronto a montré que des passants isolés secouraient une personne victime de malaise allongée dans la rue dans 90% des cas, alors que ce secours n’était donné que dans 16% des cas lorsque le passant était en présence de deux autres témoins qui restaient passifs.

Les conditions qui réduisent les chances d’une victime d’être secourues sont les suivantes :

  • L’incertitude (il est permis d’avoir un doute sur le fait que la situation soit urgente ou qu’une aide soit requise)
  • Le nombre de personnes présentes
  • Le fait que ces personnes ne se connaissent pas

Comment ne pas être victime de ce phénomène d’ignorance collective ?

L’essentiel est de comprendre que si les groupes de témoins restent passifs, c’est un signe d’incertitude et non d’indifférence.

Il s’agit donc de réduire l’incertitude du témoin et de l’amener à se sentir individuellement responsable : « eh vous, le monsieur avec un pull bleu (en le montrant du doigt), j’ai besoin d’aide, pourriez-vous m’aider ? »

La similarité

Nous sommes plus disposés à suivre l’exemple d’un individu semblable que d’un individu dissemblable.

Les publicitaires usent tout particulièrement de ce principe lorsqu’ils font intervenir des personnes « ordinaires » pour vanter les mérites d’un produit.

L’auteur donne également l’exemple de son fils de 3 ans, incapable de surmonter sa peur de nager tout seul dans le grand bassin malgré toutes les stratégies employées par son père. Finalement, ce fut de voir un autre enfant de son âge se jeter à l’eau sans difficulté qui lui permis de dépasser son blocage : si cet autre qui était comme lui en était capable, alors il pouvait faire de même.

Le taux de suicide

Dans une illustration morbide du principe de la preuve sociale, nombre de personnes déterminent le comportement à suivre d’après les actes d’autres personnes en difficulté. Ainsi, il a été observé que la médiatisation de cas de suicides entraînait irrémédiablement une augmentation du taux de suicide dans les semaines qui suivaient.

Comment dire non ?

La difficulté est d’autant plus grande que la plupart du temps, nous ne souhaitons pas nous prémunir contre les informations que nous fournit la preuve sociale. Nous devons cependant périodiquement lever la tête, et regarder ce qui se passe autour de nous chaque fois que nous sommes pris dans l’obsession des indications données par le groupe.

Chapitre 5 : la sympathie

Nous avons tendance à nous laisser plus facilement persuader par des personnes qui nous sont sympathiques.

Mais quelles sont les facteurs qui font qu’une personne ressent de la sympathie pour une autre de manière automatique ?

  • L’apparence physique : les études montrent que nous accordons automatiquement aux personnes au physique harmonieux d’autres qualités comme le talent, la bonté, l’honnêteté et l’intelligence.
  • La similarité : nous aimons ce qui nous ressemble.
  • Les compliments (même quand ils ne sont pas sincères).
  • Le contact et la coopération : mettre les gens en situation de coopération forcée augmente les relations satisfaisantes. Les professionnels de la persuasion s’efforcent ainsi de nous faire croire qu’ils œuvrent avec nous dans un but commun (exemple du scénario impliquant un méchant et un gentil flic).
  • Conditionnement et association : une association, même accidentelle avec des choses agréables ou désagréables influence la façon dont les autres nous perçoivent (exemple de la personne qui apporte une mauvaise nouvelle, à laquelle elle est immédiatement associée, ou d’une jolie femme assise sur le capot d’une voiture à vendre). L’exemple de l’engouement pour les équipes sportives relève du même processus :  nous nous prenons au jeu de nous identifier à une équipe, sa victoire (ou sa défaite) devient alors la nôtre.

Comment dire non ?

Posez-vous la question suivante : « cela fait 5 minutes que je connais cet homme, est-ce que j’éprouve pour lui une sympathie inattendue ? »

Chapitre 6 : l’autorité

Stanley Milgram, un célèbre chercheur américain, a mis en évidence la docilité sans limite manifestée par un individu adulte vis-à-vis d’une figure d’autorité.

Nous apprenons depuis notre naissance que l’obéissance aux autorités compétentes est louable et la désobéissance condamnable. Ainsi, de nombreuses recherches (et exemples historiques) montrent que quand une autorité légitime  a parlé, le bon sens n’est plus de mise.

Quelles sont les conditions qui favorisent ce phénomène de soumission à l’autorité ?

  • Les titres
  • Les vêtements (uniforme)
  • Les accessoires (vêtements luxueux, bijoux, belles voitures…)

Comment dire non ?

Notre défense fondamentale est de prendre conscience du pouvoir de l’autorité et de nous poser les questions suivantes : à quel titre cet individu est-il une autorité ? Cela a-t-il un rapport avec la question posée ?

Chapitre 7 : la rareté

Nous semblons plus motivés par la crainte de perdre quelque chose plutôt que par la perspective d’en gagner une autre de valeur égale.

Dans le cadre d’une vente, un appareil devient par exemple davantage désirable dès lors qu’il n’est plus disponible (« mais attendez, je vais tout de même vérifier en réserve… »).

L’une des tactiques de vente qui s’appuie sur le principe de rareté est de dire au client qu’à moins de décider d’acheter immédiatement, il devra payer plus cher, ou même ne pourra pas acheter du tout.

La réactance psychologique

Une fois encore, ce procédé fonctionne du fait de notre tendance à faire des raccourcis : nous avons par exemple tendance à évaluer la qualité d’un objet en fonction de sa disponibilité.

Des expériences mettent ainsi en évidence le phénomène de réactance psychologique, qui consiste à manifester une opposition ouverte devant une limitation de notre liberté. Par exemple, lorsqu’une lois limite ostensiblement la liberté d’un groupe (prohibition de l’alcool par exemple, interdiction quelconque…), cela entraîne irrémédiablement des réactions d’opposition et de revendications.

Lorsque notre liberté est restreinte dans un domaine, nous ressentons un désir accru d’obtenir les objets qui nous sont devenus inaccessibles, et nous commençons à attribuer à l’objet toute sorte de qualités.

Les conditions optimales :

  • Le passage d’une situation d’abondance à une situation de rareté produit une réaction nettement plus positive à l’égard de l’objet devenu rare. On désire davantage quelque chose qui est devenu inaccessible plutôt que quelque chose qui a toujours été en quantité limité.

Pour les chefs politiques, il est bien plus dangereux de donner une liberté et de la reprendre plutôt que de n’avoir jamais rien donné. On ne renonce pas à des libertés fraîchement acquises sans en découdre.

  • Le fait d’être en compétition pour des ressources rares est également une importante source de motivation.

Comment dire non ?

Il n’est pas forcément suffisant de connaître les causes et le fonctionnement de la pression de la rareté pour nous en protéger, car cette connaissance est purement intellectuelle, et les recours intellectuels disparaissent devant notre réaction émotionnelle à la rareté.

Conclusion

L’important est de repérer que lorsque nous prenons une décision sur quelque chose ou concernant quelqu’un, nous n’utilisons pas toute l’information disponible : nous n’utilisons au contraire qu’un seul élément d’information jugé représentatif de l’ensemble.

L’erreur est souvent provoquée par certains professionnels de la persuasion qui cherchent à profiter de la nature machinale de la réaction conditionnée.

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