Comment aider son enfant à « réussir » sa scolarité malgré ses difficultés ?

"Bonjour ,

 Je suis maman d'un enfant (garçon) de 10 ans dyslexique suivi en rééducation orthophonique et de profil de compréhention principal: kinesthesique secondaire :visuel , il est de profil d'identité :aimable essentiellement.

Il a de grosses difficultés à apprendre tout ce qui est texte (grammaire, dictée, analyse) et abstrait. Comment je peux l'aider en reformulant ses cours selon son profil ? Je ne peux pas compter sur l'aide des enseignants en classe, ils semblent démotivés et depassés. Je crains aussi pour son avenir. Quels sont les domaines dans lesquels ces enfants pourront briller et surtout suivre un cursus sans difficulté ?

merci , Houda du Maroc"

 

Bonjour Houda,

Beaucoup de parents se posent les mêmes questions que vous. En revanche, vous me poussez à intervenir sur la question de la scolarité des enfants d'âge primaire, alors que je suis complètement investie depuis deux ans à comprendre les difficultés des étudiants en début d'études supérieures.

Votre message m'a cependant beaucoup interpelé, et je me suis dit que les quelques choses que j'avais à dire sur le sujet pourraient éventuellement vous être utiles.

Vous m'amenez également à créer une nouvelle rubrique : "Aider ses enfants à s'épanouir à l'école". Car si les élèves, les étudiants et les enseignants sont majoritaires à lire ce blog, les parents sont également présents, et très préoccupés d'aider au mieux leurs enfants à trouver leur place et réussir. Si d'autres parents m'envoient leurs questions, c'est donc dans cette nouvelle rubrique que je me ferai un plaisir de leur répondre. 

Voici maintenant les différents questionnements que j'ai traduits de votre message :

Comment s'en sortir dans les matières "faites pour les auditifs" lorsque l'on est de profil kinesthésique ?

S'intéresser à la notion de profil pédagogique a un avantage : cela vous permet de commencer à mieux comprendre certaines difficultés que rencontrent éventuellement vos enfants à l'école. Vous cernez mieux pourquoi ils n'entendent pas ce que vous leur dites, ne voient vraiment pas ce que vous leur montrez ou ne comprennent rien à ce que vous essayez de leur faire expérimenter.

A chacun ses évocations privilégiées : un auditif a besoin de mots pour comprendre, un visuel d'explications imagées, schématisées et colorées.

Oui mais voilà, à l'école, les informations sont rarement communiquées par l'enseignant selon tous ces modes, et certains élèves s'y retrouvent donc plus que d'autres. Les "auditifs" et les "visuels" s'en sortent en général sans trop de difficultés. Ils seront peut-être meilleurs en récitation (pour les auditifs) ou en géométrie (pour les visuels), mais globalement, ils trouveront comment mettre en valeur leur potentiel.

Il en est parfois tout autrement pour les élèves de profil kinesthésique. Ceux-là ont besoin de ressentir les informations "dans leur corps" pour les assimiler. Ils ont besoin d'expérimenter, de manipuler et de faire eux-mêmes pour que les informations prennent sens et qu'elles s'inscrivent dans leur mémoire.

Mais comment faire pour "ressentir la grammaire" ? Comment "manipuler une poésie" ? Comment "faire" quand on nous demande d'écouter ou de regarder à longueur de journée ?

Alors oui, peut-être que le kinesthésique s'épanouira en sport, en travaux manuels ou en dessin. Mais il n'est pas dit que ces matières l'intéressent, qu'il soit agile de son corps ou qu'il ait des compétences artistiques. Peut-être également a-t-il un projet qui demande de maîtriser des savoir-faire en matière d'écriture, de lecture et de calcul. Est-il alors condamné à renoncer à ses aspirations ?

Je ne le crois pas. 

Antoine de La Garanderie, l'inventeur de la pédagogie des gestes mentaux, est d'ailleurs très optimiste. Dès l'instant où vous connaissez votre profil d'apprentissage, vous pouvez envisager des moyens de vous appuyer sur vos atouts pour progresser.

Le maître mot de cette approche en terme de progression est : "traduire".

Vous n'êtes pas doué en grammaire ? Traduisez ce qu'il y a à comprendre dans la "langue mentale" qui vous correspond. Et familiarisez-vous avec les langues mentales que vous maîtrisez moins en faisant des allers-retours entre un contenu "visuel", sa traduction en contenu "auditif" et une expérience qui vous permettrait de manipuler tous ces concepts.

Je reprends ici un exemple qui m'avait semblé très parlant : une mère de quatre enfants a évoqué dans le cadre d'une formation que j'ai suivie combien elle s'était trouvée démunie face aux difficultés scolaires de deux de ses enfants. Au détour de quelques recherches, elle avait cependant découvert qu'ils étaient tous les deux kinesthésiques…ce qui lui avait ouvert des portes et donné des idées pour les aider dans leurs devoirs à la maison. Elle expliquait notamment qu'ils ne tenaient pas en place et ne parvenaient pas à se concentrer lorsqu'elle leur expliquait "oralement" les exercices à faire. 

Elle conçut alors un jeu à l'aide de briques de couleur : les briques rouges pour les verbes, les briques bleues pour les noms, etc.

La révision des principes de grammaire devînt un "jeu à manipuler". Et non seulement ses enfants firent leurs devoirs sans difficulté (en ayant compris !), mais ils se souvinrent de tout le lendemain au moment du contrôle.

Comment aider un enfant de profil kinesthésique pour les devoirs (notamment quand les enseignants ne savent pas s'adapter à ce type de profil) ?

L'exemple de cette mère inventant un "jeu de grammaire" est charmant et très ingénieux, mais comment l'appliquer à la géométrie, au calcul, aux dictées et à la lecture ?

Plus vos enfants s'entraîneront à traduire les informations dans les différentes langues mentales (auditive, visuelle, kinesthésique), plus ils y parviendront spontanément par eux-mêmes par la suite. Il s'agit d'une gymnastique mentale à acquérir. Mais c'est comme tout, si l'on a besoin d'être guidé au départ, on s'approprie progressivement la démarche si elle a un sens pour soi. 

Evidemment, si vous vous acharnez à pousser votre enfant et que celui-ci intègre les choses de manière passive…vous aurez de plus en plus de travail, mais pas forcément beaucoup de résultats. Je vous encourage donc à associer votre enfant à la construction de ces "jeux de manipulation" qui l'aideront à progresser dans les matières qui le mettent en difficulté.

Je suis certaine que des parents ont déjà inventé de multiples techniques pour aider leurs enfants kinesthésiques. Si certains d'entre eux acceptaient de partager leurs expériences dans les commentaires, je suis sûre que tous en retireraient quelque chose de précieux (et des idées vraiment novatrices !).

Je conçois que cela demande du travail et de la créativité. Donc Houda, si vous butez un jour sur un contenu, n'hésitez pas à venir en parler dans les commentaires de cet article, afin que nous cherchions ensemble un moyen de transformer et traduire le contenu en question.

Existe-t-il des cursus ou des écoles qui donnent davantage "leur chance" aux élèves kinesthésiques ?

J'aurais tendance à penser que les matières et les voies d'apprentissage où l'enfant est acteur du processus d'apprentissage (et non uniquement récipendiaire d'informations) sont les plus à même de "faire briller" les kinesthésiques : les apprentissages en alternance, le sport, les matières technologiques…

Mais je pense également que ce n'est pas parce que l'on est kinesthésique que l'on aime ces disciplines. Je crois également que nous avons le pouvoir de nous appuyer sur nos ressources pour progresser et réussir dans les matières que nous aimons, dès l'instant où nous sommes très investi dans notre projet.

J'ai récemment été hospitalisée une semaine et j'en ai profité pour poser des questions à tous les internes en médecine que j'ai rencontrés : pourquoi avez-vous choisi ces études ? Comment avez-vous fait pour réussir votre première année (réputée la plus difficile) ?

J'ai été surprise de rencontrer un médecin qui m'a expliqué qu'il était un élève plutôt moyen jusqu'au bac (mention assez bien), mais qu'il avait toujours voulu être médecin. Tous ses professeurs lui avaient déconseillé de s'inscrire en médecine, lui prédisant un échec assuré. Et pourtant, il réussit dès la première année !

Je pensais également que les étudiants qui s'en sortaient le mieux était nécessairement des visuels (j'avais cette idée qu'ils intégraient beaucoup plus facilement les informations…je ne sais pas pourquoi). Pourtant, sur quatre internes que j'ai interrogés, tous se sont révélés être des "auditifs". Ils m'ont expliqué avoir passé beaucoup de temps à lire et relire leurs cours jusqu'à les mémoriser. Enfin, ce qui semblait faire une réelle différence, c'était leur motivation : ils étaient tous super-investis et décidés à réussir.

J'aimerais également dire un mot des "pédagogies d'apprentissage". 

D'une manière générale, l'enseignement "classique" fait la part belle à la transmission magistrale (plutôt faite pour les "auditifs", qui sont à l'aise quand ils écoutent) et aux représentations visuelles (plutôt faites pour les visuels, qui sont à l'aise quand ils regardent).

Mais certaines approches pédagogiques cherchent à mettre les élèves en position d'acteurs : les pédagogies nouvelles notamment, qui s'inspirent des travaux de pédagogues comme Freinet, Montessori ou Decroly. Vous pouvez donc faire des recherches sur ces approches et vous trouverez sûrement des écoles qui s'en revendiquent. N'oubliez pas non plus les cursus en alternance et les voies professionnalisantes.

Un enfant "dyslexique et kinesthésique" peut-il "briller" ?

Oui, je pense assurément qu'un élève "dyslexique et kinesthésique" peut briller. Vous faites vous-mêmes référence à Albert Einstein, qui était les deux…et qui s'en est, disons, plutôt bien sorti.

Il est tout à fait possible de compenser certains handicaps en s'appuyant sur ses ressources. Par exemple, dans l'école d'ingénieur où je travaille, l'un des meilleurs étudiants est de ce profil (dyslexique et kinesthésique). Il ne prend jamais de notes en cours parce qu'elles sont inexploitables ensuite (pratiquement illisibles). Il écoute, il regarde, il refait surtout des exercices chez lui, et cela lui suffit pour mémoriser ce qu'il y a à connaître. Et il réussit !

Par contre, je me demande si la question de la performance est celle qui a le plus d'importance…

Comment aider son enfant à s'épanouir à l'école ?

Je viens de terminer la lecture d'un livre qui m'a fait penser à cette question.

Il s'agit du livre d'Adèle Faber et Elaine Mazlish intitulé Jalousies et rivalités entre frères et soeurs, comment venir à bout des conflits entre vos enfants.

A priori, ce sujet n'est pas celui qui nous occupe. Une histoire rapportée dans ce livre m'a pourtant amenée à faire un lien.

Une jeune fille prend des cours de piano. Sa soeur plus jeune, très intéressée, passe beaucoup de temps à l'observer faire ses gammes et s'entraîner à lire ses partitions. Tant et si bien qu'un jour, sans avoir jamais pris de cours, la plus petite s'installe au piano et parvient à jouer le morceau sans erreur. La grande soeur est dépitée. Elle qui passe des heures à répéter, elle n'a jamais réussi à jouer aussi bien…

Elle va donc trouver sa mère, et lui dit que cela ne sert à rien de lui payer des leçons puisqu'elle ne sera jamais douée. La mère écoute…et accepte. S'en est fini des cours de piano pour la plus grande.

Des années plus tard, la jeune fille revient sur cette expérience : "j'aurais tellement aimé que ma mère me réponde autrement. En réalité, j'adorais jouer du piano. Ce que j'attendais, en fait, c'est qu'elle me dise que je n'avais pas besoin d'être performante ou douée pour avoir le droit d'aimer jouer et de prendre des cours". Le plaisir, dans cette situation, se suffisait à lui seul.

Evidemment, on a tendance à aimer ce que l'on réussit, et à réussir ce qu'on aime. mais ce n'est pas toujours le cas. Le regard des autres est également très important. Si je lis la déception dans le regard des personnes qui comptent pour moi, je vais avoir tendance à renoncer…Mais peut-être pas.

Nous ne devrions pas avoir besoin d'être performant pour trouver notre place. Une place respectée, satisfaisante et juste. Quelle qu'elle soit.

 

A bientôt,

Hélène WEBER

7 thoughts on “Comment aider son enfant à « réussir » sa scolarité malgré ses difficultés ?”

  1. Mes deux aînés ont eu la chance d’aller dans une école Montessori en maternelle mais aussi en primaire, ce qui est plus difficile à trouver. Loin de la maison, beaucoup de covoiturage, mais quel bonheur ! Tout est basé sur le matériel qu’on manipule, en francais, maths et sciences. Et les connaissances rentrent « par la main ». C’est magique, les enfants adorent…

    1. Bonjour,

      Mes parents m’ont pour ma part inscrite dans une école Montessori en maternelle, puis j’ai intégré un cursus « classique » en primaire. Ce qui est certain, c’est que cela m’a donné le goût d’apprendre en développant ma créativité. Cela permet également aux enfants d’être plus autonomes et de trouver en eux-mêmes l’envie de découvrir, expérimenter et imaginer.

      Merci pour votre retour d’expérience,

      Hélène

  2. Je crois qu’il faut que la maman inscrive son enfant dans une école spécialisée avec des enseignants professionnels et performants qui comprendront les besoins de l’enfant. Ils seront plus aptes à donner les solutions adaptées à la situation de l’enfant pour qu’il puisse se développer complètement comme les autres enfants.  

  3. Merci pour vos articles très intéressants.
    Ma fille de 15 ans est en ce moment déscolarisée mais pas radié, plusieurs soucis font que nous en sommes arrivés à cette situation, par contre elle est kinestésique (mon ainée est auditive et les 2 derniers sont trop petit donc reste à découvrir) et je cherche des méthodes qui pourrait l’aider à mémoriser ses leçons. J’ai découvert les cartes mentales mais j’aimerai avoir d’autres pistes. DOnc, je suis preneuse de toutes liens et autres qui peuvent l’aider.
    Par contre, toutes les familles n’ont malheureusement pas les moyens financiers de mettre leur enfant dans un établissement Montessouri ou autres car ces méthodes devraient être utilisées à grande échelle dans le public.
    Merci et bonne continuation.
    Sophie

    1. Bonjour Sophie,

      Je suis d’accord avec vous, certaines méthodes pédagogiques devraient être davantage diffusées.

      Pour votre fille, vous pourriez vous intéresser aux flash-cards. 

      Je vous recommande également le Brain gym : http://www.braingym.fr/

      Bonne courage à vous,

      Hélène

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