Voici les questions auxquelles vous pourrez trouver des réponses dans la première partie de cet article : Comment s’organiser pendant une épreuve sur table ? Comment gérer son temps ? Comment utiliser efficacement son brouillon ?
Attaquons-nous maintenant au vif du sujet pour envisager quelles sont les étapes à suivre en vue d'élaborer un plan, rédiger une introduction et développer une argumentation.
Quelles étapes suivre pour expliquer et commenter un texte ?
Pour répondre à cette question, je vais m'appuyer sur l'exemple concret proposé par Thomas dans le cadre de son examen de Cultures de la communication (document en version PDF).
L'exercice est ici beaucoup plus balisé que ne le serait un commentaire de texte en philosophie ou en Histoire en classe préparatoire. Deux questions sont en effet posées, et orientent donc l'étudiant concernant les thématiques à analyser et discuter.
Dans le cadre de la première question, il s'agit de montrer que le texte a été compris et que les arguments de l'auteur ont été perçus.
Il s'agit là d'une étape incontournable, quel que soit le cadre dans lequel vous avez à réaliser un exercice de commentaire de texte : montrer que vous avez compris ce que l'auteur cherche à démontrer.
Dans le cadre de la deuxième question posée, il est demandé à l'étudiant de discuter le propos de l'auteur : une fois que vous avez montré que vous avez compris son propos, il vous est demandé d'apporter vos propres arguments pour l'appuyer, le contredire ou le nuancer.
Comment élaborer un plan ?
Dans l'exemple qui nous occupe, il ne s'agit pas d'un examen qui consiste uniquement à commenter un texte. En 1h30 environ, l'étudiant doit produire les réponses à deux questions successives. On aurait donc tendance à penser qu'établir un plan et une introduction serait superflu.
Pourtant, au-delà du fait que cela va vous amener à être beaucoup plus clair et précis dans votre réponse (ce que votre lecteur appréciera), établir un plan va également vous permettre d'organiser vos idées et donc de gagner du temps.
Première question :dans cet extrait issu d'un article publié dans la revue Sciences Humaines, repérer quels sont les arguments que décline l'auteur pour justifier que l'Homme serait un "mammifère social particulier"
– Première étape : repérer les présupposés.
De quoi s'agit-il ?
Un présupposé correspond à une condition qui doit être vérifiée dans une expression pour que l'énoncé ait un sens.
Dans cet exemple, s'il s'agit de montrer que l'Homme est un animal social "particulier", cela suppose tout d'abord que l'on accepte comme vrai que l'Homme est un animal "social".
Il n'est donc pas explicitement demandé de commencer par justifier ce présupposé, mais implicitement, cela reste une nécessité (d'autant que c'est le premier argument que développe l'auteur dans son texte).
– Deuxième étape : compter le nombre d'arguments développés par l'auteur dans cet extrait, afin de cerner la logique de sa démonstration.
Pourquoi l'Homme serait un animal "social" ?
L'auteur part du principe que puisque l'Homme est un animal, il est soumis à des pulsions de vie et de survie : il donne un argument pour le justifier, illustré par quelques exemples.
Il donne ensuite un argument pour justifier le dénominatif d'animal "social" : un argument (= l'Homme a besoin du "concours d'autrui"), et l'exposé des conséquences de cet état de fait (= l'Homme développe des "comportements" spécifiques).
Pourquoi l'Homme serait un animal social "particulier" ?
A la différence des autres "mammifères sociaux", l'Homme aurait développé des "aptitudes" spécifiques : un argument, trois exemples, analyse des conséquences de cet état de fait (= l'Homme serait doté de "conscience morale").
Si la spécificité de l'Homme, en tant que mammifère social, est d'être doté de conscience morale, l'auteur en conclut que cela rend ses attitudes particulièrement complexes à appréhender. Pourquoi ?
Il s'intéresse alors à un "comportement social" qui serait spécifiquement "humain", la philantropie, afin de prendre le temps de justifier son propos à l'aide de l'analyse approfondie d'un exemple concret.
Dans le cadre d'un essai, un auteur développe toujours une série d'arguments qu'il illustre par un ou plusieurs exemples.
Un commentaire de texte suppose toujours de passer par une phase d'analyse de l'articulation logique des affirmations et conclusions exposées par l'auteur.
Pour les reconnaître, vous pouvez, comme je l'ai fait ci-dessus, travailler à repérer les questions auxquelles il répond successivement.
Dans ce premier temps d'analyse, il ne s'agit pas de discuter ou remettre en question ce qu'affirme l'auteur, mais simplement de montrer que vous avez précisément compris ce qu'il cherche à démontrer, et au moyen de quels arguments.
Vous pouvez également vous servir de vos connaissances pour préciser ce que l'auteur expose, mais sans vous éloigner de son propos. La discussion est attendue de vous dans le cadre de la deuxième question.
Le plan correspond ici à la succession des différentes affirmations de l'auteur.
- L'Homme est un animal "social"…
- …mais il est un animal social "particulier", du fait de certaines "aptitudes spécifiquement humaines"
- Ces "aptitudes", qui font de lui un être doué de "conscience morale", rendent ses comportements difficiles à comprendre.
Chacune de ces affirmations est justifiée dans le texte à l'aide d'arguments spécifiques, chaque fois illustrés par des exemples concrets.
Pour répondre à la première question, il convient donc de mettre en évidence "l'architecture affirmation/argument/exemple" qui préside à l'organisation des idées de l'auteur dans le texte.
Intéressons-nous maintenant à la deuxième question, qui invite clairement l'étudiant à discuter les arguments présentés par l'auteur, et à développer une argumentation personnelle (à l'aide de connaissances extérieures au texte).
Sujet : "La solidarité vous parait-elle être aujourd'hui une valeur source d'efficacité dans la communication ?"
– Première étape : mettre en évidence les enjeux de la question posée (=discuter les termes employés dans la question).
Quels sont les présupposés ?
– Il existerait une "communication efficace" et une "communication inefficace" : qu'est-ce que cela veut dire ? Quels seraient les critères d'une communication "efficace" ? "Efficace" dans quel sens ?
– Affirmer qu'une valeur pourrait être "source d'efficacité" suppose qu'une manière de penser les rapports humains pourrait constituer un levier d'action. En quoi la valeur de "solidarité " pourrait pousser l'être humain à agir ? Et agir avec quelles motivations ?
La question posée a des liens avec les arguments de l'auteur développés dans le texte : lesquels ?
– L'auteur affirme que la "conscience morale" de l'Homme, qui lui est spécifique en tant que mammifère social, rend son comportement difficile à comprendre. En quoi cette affirmation peut-elle expliquer la complexité des motivations de l'être humain lorsqu'il agit "au nom" de la valeur de solidarité ?
On voit ici que les points à développer sont potentiellement nombreux (et je ne les ai sûrement pas tous mis en évidence).
Encore une fois, en 45 minutes, il conviendra de faire des choix.
Voici des exemples de questions qui découlent du sujet posé :
- Discussion d'un présupposé. Exemple : Une valeur peut-elle pousser l'Homme à agir de manière plus efficace ?
- Idem : Qu'est-ce qu'une communication "efficace" ?
- Idem : Une communication efficace peut-elle être le fait d'une valeur spécifique ?
- Idem : La valeur de "solidarité" pousse-t-elle à communiquer de manière spécifique ?
Vous pouvez également discuter directement les points suivants :
- Qu'est-ce que la "solidarité", et en quoi peut-elle conduire l'Homme à communiquer de manière spécifique ?
- La valeur de solidarité conduit-elle à communiquer de manière efficace ou inefficace ? Pourquoi ?
- Qu'est-ce qu'une communication efficace, et en quoi la valeur de solidarité peut-elle la générer ?
- En quoi la valeur de solidarité peut également conduire l'Homme à communiquer de manière inefficace ?
Vous voyez que ce sujet renvoie à des questionnements multiples. C'est d'abord cette capacité à évaluer les enjeux de la question posée qui est prise en compte par l'examinateur.
Mais pour une question à laquelle l'étudiant est tenu de répondre en 45 minutes, il est impératif de faire des choix et de ne retenir que deux à trois questions seulement. Ce sont les réponses à ces deux ou trois questions qui constitueront le plan de la réponse.
Comment rédiger une introduction ?
Même pour la première question (qui ne demande pas la construction d'un devoir détaillé avec analyse et discussion), il est bienvenu de commencer par une ou deux phrases d'introduction.
Une introduction a toujours la même raison d'être, que ce soit dans un commentaire de texte, une dissertation, un livre ou un mémoire, celle de présenter ce dont il va être question dans le développement :
– Une accroche bien trouvée attire l'attention sur l'enjeu principal du développement,
– Une problématique permet de décliner les différentes questions auxquelles l'auteur tentera de répondre dans son développement;
– Enfin, l'annonce du plan précise selon quelles étapes successives les arguments seront exposés.
Dans l'exemple que nous avons choisi de traiter (grâce à Thomas), ces trois étapes sont superflux étant donné le temps imparti.
De plus, la question telle qu'elle est posée le dispense d'avoir à trouver une accroche et une problématique, puisque la question est en elle-même une problématique toute trouvée.
Si l'étudiant avait 4 heures pour analyser et discuter le texte, la première question pourrait correspondre à la première partie de son devoir (et la deuxième question à sa deuxième partie). Il s'agirait donc d'un plan de commentaire qui suivrait la logique suivante :
- Présentation des arguments de l'auteur
- Discussion des arguments de l'auteur
Mais il serait aussi possible d'envisager un autre type de plan :
- Premier argument de l'auteur dans le texte : présentation et discussion
- Deuxième argument de l'auteur dans le texte : présentation et discussion
- Etc.
Il conviendrait également de définir un questionnement transversal qui permettrait de mettre en évidence l'enjeu principal du propos développé par l'auteur.
Dans le texte pris en exemple, une problématique transversale pourrait correspondre à la deuxième question posée.
Maintenant, en ce qui concerne la première question, qui demande de mettre en évidence "l'architecture argumentative" du texte, voici les trois éléments qu'il me semble important de mettre en évidence dans le cadre de l'introduction :
– Rappel des références du texte (auteur, source, titre)
– Rappel de la question posée
– Annonce des trois temps argumentatifs correspondant au plan de la réponse (et à l'architecture du texte)
Concernant la deuxième question, je vous proposerait de suivre le plan suivant :
- Qu'est-ce qu'une communication "efficace" ?
- En quoi la valeur de solidarité peut-elle conduire l'Homme à adopter un mode de communication efficace ?
- De quelle façon et pourquoi cette même valeur peut-elle induire également une communication inefficace ?
L'introduction visera alors à dégager les différentes questions qui découlent du sujet, et ensuite à annoncer le plan.
Vous pouvez aussi repartir du texte pour mettre en évidence l'argument principal de l'auteur (= l'Homme étant un animal social spécifique, qui fait de lui un mammifère qui cherche à combler ses pulsions égoïstes, mais également à tenir compte au travers de ses actions de ses valeurs morales, ses comportements sont souvent difficiles à cerner), pour ensuite évoquer le sujet, les questions que vous allez traiter et enfin le plan.
Dans l'exemple, si l'on suit la logique de l'auteur, la solidarité, en tant que valeur morale, pourrait conduire l'Homme à agir de manière altruiste autant qu'égoïste.
Il conviendra de bien définir ce que serait une "communication efficace" (= altruiste ? égoïste ?) avant de poursuivre la discussion. Mais ce rappel du texte n'est pas obligatoire.
Comment développer une argumentation ?
Une manière de construire un plan et une argumentation consiste à clarifier d'entrée de jeu quelles sont :
– les questions que vous allez vous poser au cours de votre développement
– et les réponses que vous allez apporter.
Vous devriez ainsi, avant même de commencer à rédiger, être capable de compléter la phrase suivante : dans le cadre de cette partie, je vais montrer que…
Ensuite, pour développer votre propos, vous pouvez suivre la logique suivante pour chacune des parties :
– Formuler votre question.
– Annoncer ce que vous allez montrer (Nous allons voir que…ou je vais montrer que…).
– Justifier votre affirmation.
– Illustrer votre affirmation à l'aide d'un exemple concret issu de vos lectures, de l'actualité ou autre.
Si vous suivez ces différentes étapes, vous aurez développé un paragraphe complet.
Voici les premiers conseils que je peux donner à Thomas pour l'aider à progresser dans sa capacité à commenter un texte.
Surtout, n'hésitez pas à me poser d'autres questions dans le cadre des commentaires. Je ne prétends pas avoir balisé la question de manière exhaustive et sûrement que mes explications ne vont pas parler à tout le monde.
A bientôt,
Hélène
Bonjour,
Je tiens à vous remercier Hélène pour vos précieux conseils. Je viens de comprendre une chose étonnante en vous lisant, je n'expliquais pas assez, alors qu'il faut faire un travail de redéfinition. En fait, je partais du postulat que les correcteurs connaissaient ces présupposés.
Bonne jounée.
Thomas
Bonjour Thomas,
C’est vrai que c’est un présupposé qui pénalise beaucoup d’étudiants : « je ne vais quand même pas réexpliquer au prof ce truc qui est évident pour lui !?! »
Alors que le prof n’attend que ça !
Il ne sait pas a priori ce que l’étudiant a retenu de tout ce qu’il lui a raconté. La question est uniquement pour lui la suivante : avez-vous acquis les connaissances et compétences requises pour valider votre diplôme ?
Ce n’est pas comme si vous deviez écrire un livre susceptible de révolutionner la discipline.
Je trouve pour ma part que cela a un côté rassurant. Et cela montre bien que réussir vos examens est complètement à votre portée.
Merci pour ces échanges,
A bientôt,
Hélène