Le point commun entre un problème de maths, une dissertation de philo et Zelda 64

J'ai commencé à jouer à des jeux vidéos assez tard…et je me suis arrêtée peu de temps après avoir commencé.

Je vais vous expliquer pourquoi ça m'a beaucoup plu, et pourquoi je m'en suis lassée.

Mon premier achat : une console Super Nintendo d'occasion. On était alors en 1997.

Evidemment, je commence par Super Mario.

Je m'amuse, mais je m'énerve vite.

Pourquoi ?

Parce que j'ai du mal à être performante avec ma manette. Il faut coordonner ses deux mains, adopter le bon timing pour envoyer ses missiles et éviter les fossés, les monstres et les attaques adverses.

Et puis je découvre Zelda. Le jeu d'aventures dont vous êtes le héro.

Je me prends tout de suite au jeu. 

Le but est pour moi beaucoup plus clair et motivant. Comme pour Mario, il faut délivrer la princesse. Sauf que là, vous avez des mondes à découvrir, des objets et des armes à trouver, des obstacles à franchir et des monstres à occire. 

Je rencontre néanmoins une difficulté supplémentaire (en plus de celle afférente au maniement de la manette) : je ne sais pas toujours quelle arme utiliser pour vaincre mon adversaire.

Je ne sais pas non plus toujours où aller.

Mais dans le cadre de Zelda sur Super Nintendo, je comprends rapidement le truc :

– Si une porte reste fermée, c'est que je n'ai pas encore "gagné" l'outil requis pour l'ouvrir. Il faut donc que je passe mon chemin et que je tente ma chance dans l'un des autres mondes.

– Dans chacun des châteaux, c'est par ailleurs systématiquement la nouvelle arme que je viens de gagner qu'il faut que j'utilise pour combattre le monstre final. Inutile de m'acharner avec quoique ce soit d'autre.

Le jeu reste pour moi stimulant tant que je ne rencontre pas trop de problèmes pour franchir chacune des étapes imposées. 

Dès que cela me prends plus de dix minutes pour abattre un mur, battre un dragon ou résoudre une énigme, je passe à autre chose.

Et alors ? Quel rapport avec mes exercices de maths ?

L'objectif à atteindre devient progressivement pour moi plus important que le chemin à parcourir.

J'ai aimé les maths jusqu'au lycée parce que je prenais du plaisir à chercher les réponses aux énigmes que constituaient pour moi les questions qu'on nous posait.

Dès l'instant où cela m'a paru plus laborieux (en particulier en Terminale S option maths), je me suis demandée : quel intérêt pour moi de savoir faire ça ? A quoi cela va-t-il m'être utile ? Quelles études (et quel métier) vont me demander d'être capable de savoir refaire cela ? Ce métier et ces études m'intéressent-ils ?

Prendre du plaisir à jouer à un jeu de plate-forme comme Super Mario suppose de savoir manier la manette avec une certaine dextérité. Si cela vous demande trop d'efforts, vous allez vous interroger sur ce que vous pourrez en retirer au bout du compte.

Au lycée, lorsque vous cherchez la réponse à un exercice, vous pouvez être sûr que c'est le théorème que vous venez tout juste d'apprendre qu'il va falloir utiliser. 

Je me souviens de cette impression de flottement ressentie en 4ème lorsque j'ai découvert les "démonstrations" (Thalès et Pythagore) : il nous était demandé de "démontrer" telle ou telle chose (et non plus de seulement calculer). Je me disais invariablement : mais comment sommes-nous censés savoir ça ?!?

Et puis j'ai découvert qu'en remontant mon manuel de quelques pages, je tombais sur la leçon de référence des exercices, et qu'il suffisait d'appliquer ce que l'on venait tout juste de voir en cours….

Un peu comme pour Zelda contre les monstres…

Et c'est là que j'ai fait l'acquisition d'une console Nintendo 64.

Et évidemment, de Mario 64 et Zelda 64.

La particularité de cette console est que l'on passe de deux à trois dimensions. Et je ne vous raconte pas le temps qu'il m'a fallu pour acquérir un semblant de maniement correct de la nouvelle manette (plus de fonctions, plus de boutons et un genre de petit levier multi-directionnel…). Les connaisseurs parmis les lecteurs doivent bien rigoler de mon incompétence !

J'ai assez rapidement délaissé Mario. Impossible pour moi de manoeuvrer le personnage correctement. Il fallait le faire se baisser, glisser…puis sauter par-dessus un obstacle en faisant un looping…tout ça en rythme.

J'aurais pu persévérer.

Après tout, plus on pratique, plus on progresse.

Mais pourquoi faire ?

J'avais l'impression qu'il fallait passer de niveau en niveau sans but. 

Si au moins j'avais pris du plaisir à passer chacune des étapes. Si progresser et maîtriser le personnage avaient pu m'amuser… Le problème, c'est que j'avais le sentiment de progresser trop lentement.

Cest un peu comme lorsque vous pratiquez un sport : il faut que les exercices que l'on vous donne pour parfaire un mouvement ou acquérir un nouveau savoir-faire soient à votre niveau. Pour cela, il faut que vous ayez au moins 70% de réussite. Sinon, vous vous essouflez (à moins que le jeu en vaille la chandelle). 

Avec Mario 64, non seulement je n'arrivais à rien, mais je ne savais pas en plus ce que cela allait me permettre d'obtenir. J'ai donc mis mon jeu de côté.

Zelda 64 recélait d'autres promesses. 

Là aussi, le personnage était beaucoup plus difficile à prendre en main. Il ne s'agissait plus simplement d'avancer, de sauter et de brandir son arme au bon moment.

En trois dimensions, vous deviez utiliser tout l'espace : bondir, vous retourner, sortir une arme, mettre en pause, changer d'arme, etc. 

Il y avait donc beaucoup d'étapes d'apprentissage à traverser pour exploiter tout le potentiel du personnage. 

Quel rapport avec une dissertation de philo ?

Quand vous jouez à Zelda 64, il faut maîtriser deux choses :

  • Le maniement de la manette (je me rends bien compte que cela fait quinze fois que j'en parle, mais vous allez voir que c'est ce qui m'a fait finalement arrêter les jeux vidéos)
  • Trouver les bonnes astuces pour avancer dans la quête et choisir les bonnes armes pour terrasser les monstres ou vous sortir d'un mauvais pas.

Il y a donc à la fois un savoir-faire technique à acquérir et une activité de réflexion à mener.

En philosophie, vous devez à la fois :

  • Maîtriser les techniques de la dissertation : élaborer une introduction, une conclusion et une problématique, construire un plan, rédiger des paragraphes, argumenter, illustrer, introduire un exemple ou une citation, articuler votre réflexion à celle d'autres auteurs…
  • Acquérir des connaissances et les utiliser à bon escient.

Ces deux conditions vont progressivement me faire défaut en ce qui concerne Zelda 64.

Je me souviens être à un moment donné restée bloquée dans une salle au sein d'un château : les portes étaient fermées. Il y avait des lianes qui pendaient du plafond et une espèce de gros promontoire en pierre au centre.

Même si je n'étais pas si avancée que cela dans le jeu, j'avais déjà en ma possession une bonne vingtaine d'armes et d'outils différents.

Je savais donc qu'il fallait que je sorte de cette salle, mais je n'avais aucune idée de la marche à suivre.

Qu'ai-je alors fait ?

J'ai testé des outils et des armes au hasard. Sans résultat.

J'ai sauté (avec et sans élan), mais le promontoire était trop haut.  

J'ai essayé d'utiliser un genre de lasso, mais il ne s'accrochait à rien.

Au bout de 20 minutes, j'en ai jeté ma manette de dépit.

Quelques jours plus tard, j'ai demandé à un ami s'il était parvenu à sortir de cette salle. Il passait pour sa part beaucoup de temps à jouer (il maniait beaucoup mieux la manette que moi !).

– Bien sûr s'est-il exclamé ! C'est sûr qu'il fallait chercher un peu, mais quand tu te places à côté du promontoire dans un certain angle et que tu utilises la chaîne amovible, du peux te hisser vers le promontoire. 

– C'est quoi ton "angle" ? lui ai-je demandé.

Il m'a indiqué un truc (genre au degré près) qui m'a paru impossible à reproduire. 

Finalement, il a dû me montrer pour que je capte le truc et que j'arrête de le traiter d'affabulateur chronique.

Et là, j'ai vu.

Il a placé son personnage dans un recoin que je n'avais même pas remarqué. Il a balancé sa chaîne, s'est hissé jusqu'au promontoire et il est retombé.

– Alors ? ai-je dit.

– Attends, ce n'est pas si simple. Il faut se retrouner au dernier moment pour réussir à s'accrocher. Ensuite, c'est facile, tu te hisses et c'est bon.

C'est facile, oui…

Impossible pour moi de reproduire l'angle, ni le "lâcher prise", ni le hissage final.

Je n'avais eu à aucun moment l'idée d'utiliser la chaîne. Tout ça prenait trop de temps. Et si à un quart du jeu, j'étais déjà aussi nulle, autant arrêter les frais tout de suite. 

Finalement, la princesse pouvait bien rester dans son donjon. Je n'avais plus si envie que ça de la délivrer. 

Les maths, du lycée aux études supérieures…

Les étudiants que j'accompagne en école d'ingénieur ont tous traversé le lycée comme moi Zelda sur Super Nintendo.

Un théorème. Un exo d'application (fastoche). Un exo plus compliqué (on fait comment ?). Correction par le prof (ah ben c'est trop fado en fait). Je révise l'exo compliqué. L'exo compliqué tombe au contrôle. L'exo compliqué tombe au bac. Mention.

Et puis j'arrive en première année d'école d'ingénieur.

Premier cours : quinze définitions, douze thèorèmes (et leurs démonstrations).

Deuxième, troisième….quatorzième cours : idem.

Séance de travaux dirigés : des exos compliqués. La correction ? Compliquée aussi.

Les révisions : 80 définitions, 70 théorèmes (et leurs démonstrations). Des exos de TD dont vous n'avez pas compris la moitié des corrections…

Le partiel : vous êtes dans une salle que vous n'avez jamais vue, des lianes tombent du plafond et un promontoir en pierre vous nargue au milieu des statues.

Vous ne savez pas maîtriser la moitié des outils que vous avez avec vous : de toute façon, vous en avez oubliés beaucoup, certains sont flous, d'autres ne vous seraient utiles que dans certaines circonstances très précises.

Vous tentez donc de vous servir de ceux que vous connaissez le mieux : toutes les portes restent fermées. 

Vous tournez en rond autour du promontoir jusqu'à la fin du temps imparti.

GAME OVER

Le parallèle entre Zelda, la philo et les maths lorsque l'on réfléchit

Vous êtes face à un problème.

Le problème est une question qui vous donne un objectif à atteindre : sortir d'une salle de château, démontrer que deux droites sont parallèles (ou qu'une suite est convergente), déterminer si "l'Etat a pour but de maintenir l'ordre ou d'établir la justice".

Deux voies sont alors possibles :

  1. Partir de vos connaissances
  2. Partir du sujet

Si vous pensez ne pas avoir assez de connaissances, vous risquez de chercher à les utiliser coûte que coûte. Peu importe leur pertinence concernant le problème posé.

Par exemple, dans ma salle de château, enfermée à double-tours, je faisais tout et n'importe quoi pour essayer de m'en sortir : je coupais tout ce que je pouvais avec mon épée, j'essayais de grimper aux murs, etc.

En philo, j'essayais de voir comment j'allais pouvoir utiliser mes trois citations apprises par coeur.

En maths, je me lançais directement dans des calculs…on ne savait jamais, sur un malentendu, ça pourrait toujours marcher (non ?). 

Si vous pensez ne maîtriser que quelques définitions ou quelques théorèmes, que vous n'avez aucune référence en mémoire en philosophie, ni aucune maîtrise un peu tranversale de tous les outils et armes à votre disposition dans Zelda, vous foncez tête baissée.

Vous mettez tout ce que avez sur la table, et vous essayez de voir, une chose après l'autre, si vous allez pouvoir vous en sortir.

Le problème, c'est qu'il y a tout de même peu de chances pour que vous tombiez exactement sur les deux théorèmes sur lesquels vous n'avez pas fait l'impasse.

Par contre, lorsque vos connaissances sont précises, organisées et exhaustives (par rapport au programme tout du moins), vous pouvez cette fois partir du sujet :

  1. Vous vous arrêtez sur l'objectif à atteindre.
  2. Vous mettez au clair les données du problème.
  3. Et vous cherchez l'outil et les connaissances qui vont vous permettre de faire le lien.

Par exemple.

Vous devez démontrer qu'une suite est convergente (problème de maths). Voici alors les questions que vous pouvez vous poser :

  1. Quels sont tous les outils que vous avez en mémoire qui traitent de la notion de convergence (théorèmes, définitions, postulats, etc.) ?
  2. Quelles informations vous sont données dans l'énoncé (ou dans les réponses aux questions précédentes) ?

Vous n'avez plus alors qu'à sélectionner l'outil pertinent et l'utiliser.

J'en profite pour faire la distinction entre la capacité à sélectionner le bon outil et la capacité à l'utiliser. Dans Zelda 64, on pouvait tout à fait me dire quel était l'outil qu'il fallait que j'utilise (la chaîne), sans pourtant être capable de l'utiliser correctement…cela demande tout de même souvent un peu de pratique.

Idem en philo.

Quelles connaissances (définitions, citations, analyses, auteurs, ouvrages…) seriez-vous à même de mobiliser pour discuter  "les fonctions de l'Etat", la notion de justice et d'injustice, la notion d'ordre ou de désordre… ?

Là encore, vous pouvez avoir beaucoup de connaissances, mais ne pas être en mesure de les utiliser correctement. Pour ce faire, il faut que vous ayez appris à construire une dissertation (et notamment une problématique).

Et la motivation dans tout ça ?

J'ai délaissé les jeux vidéos parce que les efforts requis pour progresser ne valaient pas ce que j'en retirais.

C'est devenu progressivement une contrainte (un comble pour un jeu vidéo !).

Le plaisir que l'on prend dans la réalisation d'une tâche est à la fois inhérent à la tâche elle-même (c'est alors une fin en soi) et/ou à ce à quoi elle nous permet d'accéder (la fin justifie alors les moyens).

8 thoughts on “Le point commun entre un problème de maths, une dissertation de philo et Zelda 64”

  1. Bonjour,
     
    En réponse à votre poste, je dirais donc que si vous insistez autant sur la constitution d'un projet professionnel, c'est quasi-exclusivement pour se donner cette fin qui nous permettre d'avoir une certaine envie d'aller au delà du problème posé, que ce soit en maths ou en philo. Et si le projet professionnel n'est pas en accord avec ce que l'on fait… autant arreter tout de suite
     
    "Impossible pour moi de reproduire l'angle, ni le "lâcher prise", ni le hissage final." J'aime cette expression du "lâcher prise" qui pour moi est souvent utilisé sans vraiment rechercher le problème. J'aimerais rebondir dessus. Dire "lacher prise" ce n'est qu'imposer a quelqu'un de contourner ses difficultés qui font ne pas lacher prise justement. Par exemple le stress frustre, nous amène a se dévaloriser et a toujours vouloir faire mieux alors que ce qu'ils font est déjà bien pour se sentir tout de même à la hauteur. (quand on pousse un grand stressé à faire ce qui lui plait, c'est toujours bien, du moins en général). Dire à une personne stressée "lacher prise" ne l'aidera pas à aller au devant de ses problèmes, il lui signifie juste qu'il à un problème. Dire "lacher prise" ce n'est qu'une manière vague d'endiguer le problème.

    1. Bonjour Maxime,

      Il est vrai que j’insiste beaucoup sur la question du projet professionnel.

      Ce que je voulais vraiment mettre en évidence, c’est que pour avoir envie « d’aller au-delà du problème posé », il faut prendre du plaisir dans la tâche en tant que telle, et que ce plaisir est tout de même dépendant de la réussite que l’on a concernant la tâche en question. Si l’on rencontre des difficultés et que l’on doit persévérer beaucoup pour les dépasser, il faut que d’autres motivations entrent ligne de compte.

      Je suppose que si j’avais été vraiment douée avec ma manette, j’aurais sûrement joué plus longtemps aux jeux vidéos. Mais peut-être un temps seulement.

      Par ailleurs, il n’y a pas que le projet professionnel qui définit une personne. En tant que professionnel ou étudiant, nous avons également des hobbies, des loisirs, une vie de famille, des vacances, des amis…nous sommes engagés dans des associations, nous faisons du sport, etc. Toutes ces activités et affinités nous poussent également à nous dépasser, à nous questionner et donc à ne pas nous laisser démoraliser par la première difficulté.

      Je trouve vos remarques sur la question du « lâcher prise » vraiment intéressantes. Je vous rejoins d’ailleurs tout à fait. Lorsqu’une chose a beaucoup d’importance pour moi, j’ai du mal à accepter qu’on me dise : « mais déstresse, ce n’est pas grave ».

      J’ai plutôt besoin que l’on m’aide à comprendre pourquoi c’est si important pour moi. Bien souvent, on s’aperçoit que l’on s’accrochait à une chose qui n’était pas véritablement le fond du problème.

      Par exemple, vous rentrez chez vous et vous vous fâchez avec votre colocataire parce qu’il n’a pas rangé ses affaires dans le salon. Lui vous répond effaré : « mais hier, toutes ces affaires étaient déjà là et ça ne te posait pas de problème ! » Vous vous enfermez alors dans une dispute qui vous amène à cristalliser le problème sur la question du rangement, alors qu’en réalité, ce n’est pas si important pour vous.

      Par contre, en creusant un peu, vous pourriez vous apercevoir que vous avez eu une sale journée, et que vous avez dû beaucoup prendre sur vous quand un prof ou votre responsable hiérarchique vous a fait des remontrances que vous jugiez injustifiées. Chez vous, vous n’avez plus besoin de prendre sur vous. Vous pouvez donc allègrement vous disputer avec votre coloc pour décharger votre agacement accumulé…

      A bientôt,

      Hélène WEBER

  2. Bonjour,
    J'ai trouvé cet article très intéressant, ainsi que votre blog d'une manière générale. En fait si j'ai bien compris : il s'agit de savoir rebondir face à un échec. C'est-à-dire trouver la bonne clé qui nous permettra d'ouvrir la porte. Le point important pour ouvrir et même défoncer la porte, est je pense, de pouvoir identifier ce qu'il se cache derrière la porte. Pour atteindre notre objectif. Je vais prendre mon exemple, j'ai repris mes études via le Cned dans la communication. Très motivé, engagé.. Toutefois je remarque qu'il est assez difficile d'ouvrir la porte même avec de la ténacité car derrière la porte il y a un mur en béton armé autrement dit la précarité. Il est possible que je n'ai pas suffisamment réfléchi à mon projet professionnel. Toutefois une chose est sûre c'est que nous ne maîtrisons pas tous les paramètres, la réalité me semble plus complexe. Une chose utile avec les objectifs, ils nous permettent d'avancer, et un jour ou l'autre réussir, d'où la nécessité du rebond face à l'échec.

    1. Bonjour Thomas,

      Je vous remercie beaucoup pour votre témoignage.

      J’ai toujours beaucoup d’admiration pour les personnes qui s’engagent dans des études par correspondance. Quand on rencontre des difficultés ou que l’on ne comprend pas vraiment ce qui est attendu, j’ai l’impression que cela doit être compliqué de trouver les bons interlocuteurs (enseignants, étudiants…) et les ressources pour progresser…

      Quand vous parlez de « précarité », voulez-vous dire que la situation sociale et financière des étudiants joue un rôle important dans leur réussite ? Si c’est ce à quoi vous faites référence, je suis tout à fait d’accord avec vous.

      Poursuivre un cursus d’études, c’est aussi appartenir à un groupe, celui constitué des personnes qui se sont engagés dans la même voie que la vôtre. Or, les différences sociales dans ce groupe peuvent générer de vrais problèmes. Certains étudiants me disent parfois qu’ils comptent chaque sou, chaque semaine pour réussir à boucler leurs fins de mois. Du coup, ils sont parfois exclus des lieux et des activités où les échanges ont lieu et où les amitiés se créent : les sorties au ciné, dans un bar ou une boîte de nuit, la bouteille que chacun ramène quand on est invité à droite à gauche…

      Même boire un café à la terrasse d’un bistro peut constituer une dépense de trop dans un budget limite.

      Il est certain que beaucoup de paramètres entrent en ligne de compte dans la réussite universitaire. Et là où se situe la véritable injustice, c’est qu’ils passent souvent inaperçus pour la plupart d’entre nous…

      Je vous souhaite toute la réussite possible dans ces études de communication que vous avez entreprises. Et soyez assuré que la motivation et l’engagement sont  des paramètres essentiels.

      A bientôt,

      Hélène

  3. Bonjour Hélène,
     
    Je trouve votre analyse vraiment objective, vous arrivez à vous extraire de vos propres perceptions pour mieux comprendre les autres. Sans vouloir vous flatter vous faites preuve d' une grande ouverture d'esprit, vous savez écouter.
    Quand je parlais de précarité c'était plus après les études, avec le peu d'offres dans ma branche.
    Vous avez raison, le fait d'être étudiant demande beaucoup de sacrifices économique, car les bourses ne remplissent pas vraiment le frigo.
    Il y a une chose frappante d'un point de vue sociologique, que j'ai pu constater : ma famille est majoritairement issue de « la classe ouvrière » et bien d'une manière générale ces personnes sont très critiques sur les études, sans doute, pour eux le travail intellectuel consiste à rester sur une chaise et faire la fête le week end. D'autre part l'image qu'ils ont du travail se résume bien souvent à celui qui force le plus. Par contre, les amis qui ont fait des études tiennent un discours positif, « tu as raison de reprendre, c'est bien ». Je m'égare un peu du sujet de l'article…
    à bientôt,
    Thomas

    1. Bonjour Thomas,

      Le sujet que vous évoquez ici est très important.

      Lorsque l’on appartient à la classe ouvrière, on appartient à un groupe où les solidarités peuvent être très fortes (avec des valeurs marquées comme le fait de savoir prendre sur soi, de travailler dur, d’être fier du travail bien fait…), et en même temps souffrir d’occuper une place « déclassée » au niveau de la société globale (bas salaires, précarité de l’emploi du fait des fermetures d’usine ou des délocalisations, postes avec peu de responsabilités…).

      Je ne crois pas que ce soit le travail intellectuel en tant que tel qui soit méprisé, mais le fait qu’il renvoie parfois les autres au fait qu’ils ne font pas partie de ce « monde-là ». Finalement, faire des études éloigne et exclue parfois. Les parents ne reconnaissent plus leurs enfants qui savent des choses qui sont inconnues d’eux et qui s’intéressent à un « monde » auquel ils n’appartiennent pas eux-mêmes.

      Qu’en pensez-vous ?

       

      A bientôt,

      Hélène

  4. Bonjour,
    Je suis entièrement d'accord avec vous sur les valeurs véhiculées par la classe ouvrière. On remarque souvent une générosité et de belles valeurs humaines, dans cette classe.
    Il est vrai que les parents s'éloignent de leurs enfants car ils se sentent dépassés intellectuellement. Aussi, un étudiant quand il débute en fac se sent pousser des ailes, avec la masse d'informations qu'il reçoit. Dans certains cursus notamment en philosophie, sociologie, psychologie.. où l'on s'attache à comprendre l'homme et la société de façon complexe. On peut très vite remettre en cause les fondements d'une éducation un peu dogmatique de ses parents. Il s'ensuit une forme de blocage dans la communication, les parents pensent que l'enfant prend la grosse tête, tandis que l'étudiant souhaite juste appliquer ses nouvelles connaissances.
    Il y a certainement un respect des études dans le milieu ouvrier, par contre je suis persuadé qu'il y a une peur de dépasser sa condition, de briser « son déterminisme ».. Je ne suis pas sur de bien me faire comprendre…
    En fait, j'ai remarqué qu'il y a inconsciemment une dévalorisation de la réussite dans les études, où chaque classe est condamnée à garder la même trajectoire. J'ai noté cela aussi dans les milieux plus aisés, où il ne faut pas devenir ouvrir car c'est dégradant.
    Les études permettent d'enrichir ses connaissances, d'utiliser des méthodes pour mieux argumenter. Généralement, un ouvrier n'a pas la maîtrise de ces techniques et peut se sentir moins bien, moins intelligent, moins intéressant, alors que c'est totalement faux. Il a en effet, acquis des techniques avec ses mains demandant des années de travail, et donc cela reste pour moi une forme « de savoir ». Je me demande parfois pourquoi la connaissance universitaire est plus valorisante. On assimile souvent la classe ouvrière à la classe dominée, alors qu'elle est autant utile à la société que les autres classes.

    Juste un point de vue, qu'en pensez-vous?

    à bientôt,
    Thomas

    1. Bonjour Thomas,

      Je trouve que vous avez une analyse très fine et respectueuse de votre sujet.

      Je pense que « la connaissance universitaire est plus valorisante » dans notre société parce qu’elle permet d’accéder aux places de pouvoir : des salaires plus élevés, des postes plus prestigieux, un pouvoir sur les autres plus important. La classe ouvrière est dite « dominée » parce que les ouvriers n’ont tout simplement pas accès aux mêmes biens de consommation, aux même logements, aux mêmes soins, aux mêmes vacances, aux mêmes considérations sociales que les classes plus aisées.

      Est-ce normal ? Est-ce légitime ?

      Il s’agit là de questions politiques. Quel projet de société avons-nous ?

      Certains vous diront que donner la même chose à tous quel que soit le statut social (travail, capital économique…) reviendrait à assister ceux qui n’auraient pas fait les efforts nécessaires pour accéder à des positions sociales plus valorisées. Pourquoi donner de l’argent aux chômeurs ? Pourquoi une CMU ? L’avenir appartiendrait aux méritants uniquement…

      D’autres vous diraient que le mérite n’est pas tout. « Briser son déterminisme » est difficile et douloureux. Faut-il pour autant y renoncer ? Assurément pas. Mais je pense que nous n’avons pas tous les mêmes ressources pour y parvenir. Donner davantage à ceux qui ont davantage besoin est une voie qui me correspond mieux.

      Ce qui est une certitude, c’est que la classe ouvrière est comme vous le dite assurément autant utile à la société que les autres classes.

      A bientôt,

      Hélène

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