Qu’est-ce que réfléchir veut dire ? Et quelles sont les étapes pour y parvenir ?

 
 

« Les fraises que j’ai achet(é) ce matin au marché sont délicieuses ».

Comment accordez-vous le participe passé « achet(é) » dans cette phrase ?

Mais réfléchissez enfin ! m’invectivait ma prof de Français au collège. Je regardais le tableau, je me concentrais, mais tout ce que j’avais dans la tête, c’était un grand blanc. L’enseignante bouillonnait, pendant que trois élèves du premier rang levaient frénétiquement la main pour attirer l’attention (manifestement, eux avaient « réfléchi » plus vite que moi).

On va lui laisser un peu de temps pour réfléchir, ajoutait ma prof. Sauf que le temps ne m’aidait pas. Plus les secondes défilaient, plus je bloquais. Sous la pression (tous les yeux étaient braqués sur moi), j’oubliais instantanément tout ce que je savais. Et je n’avais aucune idée de la façon dont il fallait que je m’y prenne pour raisonner de manière adaptée, ni faire revenir les informations utiles, que ce soit en mathématiques, en grammaire ou en orthographe.

Comment démontrez-vous que ce triangle est rectangle ? Combien de temps faudra-t-il pour que cette baignoire se remplisse ? A quelle heure les deux trains vont-ils se rencontrer ?

Quelle est la proposition principale de cette phrase ?

Pour la plupart des élèves, ces différents problèmes ne sont pas difficiles à résoudre. Ils savent « réfléchir » et trouver les solutions. Et lorsqu’ils « pensent » spontanément à la réponse, leurs enseignants se figurent qu’ils ont « bien travaillé ».

Pour moi, les choses se sont réellement corsées après le bac. C’est en première année de classe préparatoire littéraire que j’ai réalisé que je ne savais pas réfléchir. Premier devoir sur table de l’année en philosophie. 6 heures d'affilé à plancher. Le sujet : « Le pouvoir de l’amour ».

Je me souviens avoir fixé le tableau avec incrédulité : le pouvoir de l’amour ? Ce n’était pas un sujet ça…

Autour de moi, les étudiants ont regardé ces cinq mots d’un air entendu. Pourquoi étais-je la seule à ignorer ce qu’on attendait de moi ? Comment pouvait-on nous donner un sujet qui ne posait pas de question ? Je n’avais aucune idée de la marche à suivre…

Une fois de plus, la tête entre les mains, je n’avais que du blanc dans la tête.

Mais alors, qu’est-ce que « réfléchir » veut dire ? Quelle est la démarche à adopter lorsque l’on cherche la solution d’un problème ou la réponse à une question (d'autant plus quand il n'y a pas de question) ? Et lorsqu’on ne trouve rien, qu’est-ce qui ne fonctionne pas, et comment faire pour s’améliorer ?

Les 4 étapes de la réflexion

Reprenons notre exemple.

« Les fraises que j’ai achet(é) au marché ce matin sont délicieuses ».

Comment accordez-vous le participe passé « achet(é) » dans cette phrase ?

Je vous propose de décortiquer les différentes étapes par lesquelles nous devons passer pour répondre à cette question.

1-      J’analyse la question posée

Il s’agit d’un problème de conjugaison (« accorder un participe passé »).

Quelles sont les données du problème ?

–          La proposition est au passé composé (« j’ai achet(é) ») ;

–          L’auxiliaire employé est le verbe avoir (« j’ai ») ;

–          Le complément d’objet direct (« les fraises que j’ai…») est situé avant le verbe ;

–          Le COD est un nom féminin au pluriel (« les fraises »).

Dans cet exercice particulier, il s’agit de retrouver comment s’accorde le participe passé « achet(é) ».

Mais lorsque l’on analyse le problème général, la question est de savoir comment s’accorde un participe passé dans une proposition au passé composé, lorsque l’on emploie l’auxiliaire avoir et que le COD est placé avant le verbe dans la phrase.

2-      Quelle est la règle qui s’applique dans ce cas particulier ?

C’est là que je fais un retour sur les règles que j’ai apprises :

  • dans une proposition au passé composé, le participe s’accorde avec le sujet si l’auxiliaire est le verbe être ;
  • si l’auxiliaire est le verbe avoir, le participe passé est invariable, à moins que le COD soit placé avant le verbe ;
  • dans ce cas, le participe passé s’accorde avec le COD.

3-      Comment appliquer la règle au cas particulier de l’exercice ?

L’auxiliaire de la proposition est le verbe avoir et le COD est placé avant le verbe : le participe « achet(é) » va donc s’accorder avec « les fraises », qui est un nom féminin pluriel.

4-      Comment communiquer le résultat de manière adaptée ?

On ne me demande pas a priori de justifier ma réponse, je peux alors simplement communiquer que le participe passé s’accordera avec le COD « les fraises » et s’écrira donc de la manière suivante dans cette phrase : « achetées ».

Conclusion ?

J’imagine que rédigé de cette façon, cet article ne vous apprend rien.

Pourtant, vous auriez été surpris par la variété des réponses que j’ai obtenues lorsque j’ai soumis mes étudiants de première année d’école d’ingénieur à ce même exercice :

  • Des réponses données spontanément sous la forme interrogative : « acheté-e » ? Non « acheté-e-s » ? « Achete-r » ???
  • Des recherches à voix haute : « alors, si je dis les fraises que j’ai prises…est-ce que ça fait bien ? », ou alors « c’est l’auxiliaire avoir, donc on n’accorde pas ! »

La démarche en 4 étapes que j’ai énoncée est la même quelle que soit l’exercice posé :

  • analyse du problème,
  • recherche de la règle,
  • application, 
  • et communication de la réponse. Car qu’est-ce que « réfléchir » veut dire ?

L’activité de « réflexion » consiste à mettre en lien un problème présent avec des évoqués mémorisés.

Vous êtes confronté à un problème à résoudre et vous allez chercher les règles (ou les lois) que vous avez en mémoire afin de retrouver celle qui s’applique dans ce cas particulier.

Par contre, il est bien évident que chaque étape comporte ses points critiques et ses difficultés. C’est d’ailleurs ce que nous allons analyser dans l’article suivant : «  Les « pannes » de la réflexion ou les obstacles à surmonter lorsque l’on réfléchit ».

Si je reviens finalement sur mon devoir sur table de philosophie : mes cours de terminale ne m'avaient pas permis de comprendre de quelle façon on élaborait une problématique, comment on construisait un plan et encore moins de cerner quelles étaient les règles à appliquer pour concevoir une argumentation acceptable.

Sachez donc que les élèves qui s'en sortent le mieux sont d'abord ceux qui ont su repérer quelles étaient les règles importantes à mémoriser en fonction des problèmes à résoudre (en philosophie comme en mathématiques, ou dans toute autre matière d'ailleurs). 

 

3 thoughts on “Qu’est-ce que réfléchir veut dire ? Et quelles sont les étapes pour y parvenir ?”

  1. <em>Le pouvoir de l'amour ? </em>

     

    Connaissez-vous le pouvoir des contraires ?

     

    Contraire de Pouvoir  = Faiblesse.

    Contraire d'Amour = Haine.

     

    Le "pouvoir de l'amour" peut se décliner en un carré de pistes à suivre.

     

    Le pouvoir de l'amour

    La faiblesse de l'amour

    Le pouvoir de la haine

    La faiblesse de la haine.

     

    Chaque terme de l'énoncé cache, en réalité, un double.

    C'est une règle que l'on ne donne jamais, mais qui est là, bien présente.

     

    Et peut-être triple, si on adopte la voie du milieu.

     

    Entre haine et amour, n'y a-t-il pas la neutralité ?

     

    Entre pouvoir et faiblesse, quel est le terme du milieu ?

    Quel est celui qui vous vient spontanément ?

     

     

    Après le pouvoir des contraires, on peut utiliser la force des adjectifs, ou des associations courantes

     

    L'amour marital, l'amour filial, l'amour de la patrie, l'amour avec un grand A ?

     

    Le pouvoir, c'est la richesse, c'est l'argent, c'est la politique, c'est la puissance, c'est la conquête.

     

    Le pouvoir de l'amour, la richesse de l'amour, l'argent de l'amour, la politique de l'amour ?

    La puissance de l'amour, la conquête de l'amour.

     

    Et autant de doubles cachés.

     

     

    Si ça ne suffit pas, rajoutez un terme. Le premier qui éclôt dans votre cerveau.

    Exemple : perroquet.

     

    Le pouvoir perroquet/répétitif de l'amour ?

    Le pouvoir sabot/à petit pas de l'amour ?

     

    En cinq, dix minutes, on peut trouver une série d'associations.

    Plusieurs devraient faire tilt.

     

    Quand on n'a pas d'idées, et même quand on en a, le pouvoir des contraires, des antonymes permet de fouiller au-delà de la première impression.

     

    Idem pour les accords.

     

    Utiliser le contraire, ça veut dire supprimer les termes en trop, ceux qui perturbent.

    Foin du COD ou du passé composé qui compliquent la sauce.

     

    "Les fraises que j’ai achet(é) au marché ce matin sont délicieuses"

     

    c'est :

    "Les fraises achet(ées) au marché ce matin sont délicieuses"

     

     

    Et l'accord est évident.

     

     

    Pour l'accord, il faut simplifier.

    Pour répondre au devoir littéraire, il faut augmenter ou complexifier la question.

     

    Encore une fois, c'est l'utilisation des contraires.

    Augmenter ou complexifier, réduire ou simplifier.

     

    Merci pour ce blog très intéressant pour ces solutions.

      L'Amibe_R Nard

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